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      C'était l'été, il faisait chaud, elle allait, tout de noir vêtue avec le même petit chapeau de paille noir sur la tête, été comme hiver.

    Elle allait sur le chemin qui menait de sa maison à son jardin.

     

       Sa maison était au bout du village, pas en très bon état, arrangée de bric et de broc comme peut le faire une femme seule,

    sans homme et sans beaucoup de revenus. Au village elle n'était pas très aimée, on disait beaucoup de choses sur elle,

    les unes plus folles que les autres. Tout ce que l'on savait de sûr c'est qu'elle touchait le fond de solidarité, piètre revenu !

     

       Elle allait donc sur son chemin bredouillant des mots incompréhensibles,

    elle ne parlait jamais à personne. On l'appelait  "la barjotte"

     

      Dans ce jardin elle avait fait pousser quelques légumes : des pommes de terre, des poireaux, des carottes des salades....

    l'essentiel pour une soupe quotidienne. Mais il y avait aussi 'le rosier'. Un rosier à l'ancienne aux fleurs délicieusement parfumées.

    Elle prenait grand soin de ce rosier. C'était comme si ces roses n'avaient que jeunesse et épanouissement.

    Il n'y avait jamais une fleur fanée ou séchée et cela contrastait avec la barjotte qui, la pauvre,

    paraissait bien décatie avant l'âge, du moins dans son aspect extérieur.

    Mais qu'y a-t-il à l'intérieur de chacun de nous ?

    Si l'on savait on serait souvent bien surpris !

     

      Le plus intriguant était qu'à la saison elle ramenait tous les jours une rose à la maison.

    Était-ce pour son fils unique le pauvre Thierry ? Il n'avait pas toute sa tête, le pauvre gars, et on le voyait bien rarement .

    Était-ce pour égayer la maison ou pour l'offrir par dévotion à une image sainte ?

    Personne ne le saura.

     

     Étrange cette femme, à certains détails on pouvait percevoir qu'elle avait reçu une bonne éducation ;

    elle aurait pu être belle mais elle était là comme brisée, écrasée par le secret de sa vie, un chagrin d'amour peut-être …

     

      Dans le village on se demandait qui était le père de cet enfant.

    Etait-il mort à la guerre, avait-il disparu ?

    Certains disaient que ce devait être l'enfant de la honte et que ses parents avaient dû la chasser.

    Elle se serait établie dans ce village pensant y trouver la paix pour elle et son enfant

     

      Quelque fois elle prenait le train pour Briançon et quand elle revenait elle paraissait plus heureuse

    et passait faire ses courses à l'épicerie. Évidemment cela intriguait, que faisait-elle à Briançon ?

     Les commentaires, elle ne s'en souciait pas, elle les provoquait presque.

    Elle avait décidé que sa vie lui appartenait et qu'enfermée dans son secret elle y gagnait une liberté .

    Elle faisait fi des commentaires, fi des convenances sociales.

    Peut-être avait-elle trouvé dans ce comportement une certaine forme de bonheur ou du moins une possibilité de vie

     

    Une sacrée bonne femme "la barjotte" et sa force de caractère laisse à penser....

     


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  • Sarahminou est décédée le 22 octobre 2012


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